❧ Leon de Saincte More, dit de Monthozier, Chevalier de l'ordre de sainct Jean de Hierusalem, A Charles de Saincte Marthe, Salut
Mon Voisin, ce qui m’induict à t’escrire, est ta bien reputée renommée ; et t’ayant entendu, en maints lieux, où tu as esté depuis ton departement de Poictiers, de maints regretté. Et nonobstant qu’as soubstenu plusieurs adverses Fortunes, es pays loingtains, à toy toutefoy prosperes, as esté dernierement bien venu, et mieulx receu, en ce tant honorable College de Lyon, estant des sçavants trouvé capable, à la profession publique, des quattre tant estimées et utiles Langues, Hebraicque, Greque, Latine, et Gallicque ; qui faict foy certaine, que l’Eternel, maintient continuellement en vertu, ceulx qui l’ayment, et bien traictent ses tant recommendées parolles, contre l’opinion et sinistre jugement d’aulcuns. Si ton Pere, que je cognoy, bien estimé par ses Vertus, et lettres, peut au long estre adverty, ta pergrination avoir esté exercée, en sçavoir et louable vie, aura merveilleusement aggreable ton heureux et desiré retour, faisant le debvoir paternel. De tes Freres, ilz ne fauldront au naturel, et deu commandé, et te peux persuader, que tu en as aulcuns, desquels useras comme de toy ; et qui ont le desir (sans fiction) te secourir de tout leur pouvoir. Je vouldroys entendre de toy, si as ceste bonne volunté, d’addresser partie de tes Œuvres, et quelz, à ceste tant honnorable Dame, Madame la Duchesse d’Estampes : car suis certain, qu’il ne t’adviendra plus grand advancement d’honneur, ne plus de plaisir, à tes Amys que de faire present de chose louable, et aggreables, à celle tant vertueuse et tresliberalle Princesse, en laquelle est le pouvoir de donner moyen à ton sçavoir et affecté desir faire chose proffitable, et de grand’ efficace, à l’utilité publicque, qui seroit perpetuelle obligation envers tous. Fay moy sçavoir du tout. Je supply l’Eternel, nostre justificateur, et dateur de toutes graces, nous conduire en spirituelle vie.
D’Hyeres en Prouvence, Le XX. de Juing M. D. XL.